Paris - New York
      

actuelles, en sachant qu’avec la capacité de nos satellites la science est capable d’obtenir des images des principales planètes et satellites du système solaire.

 

        

C’est un outil qui remplace le papier et qui reprend les mêmes fonctions, avec les mêmes desseins, qui par le prétendu savoir du lieu entraine la croyance d’un droit de conquête, conscient ou non, sous des formes diverses. C’est une variante du produit de base, comme il y a aussi des cartes dont la forme dépend du pays ou de la culture dans lesquelles elles se sont développées ou importées. Dans ma recherche, je suis partie d’une opposition à la surface plane de la carte, et des lignes et des frontières qu’elle trace sur le sol. Je me suis positionnée sur un objet plutôt familier, qui correspond à la culture occidentale dont je suis issue. J’ai donc cherché d’autres formes, matérielles, issues de cultures différentes à la mienne dans l’idée d’y trouver des représentations plus honnêtes des terres et des gens qui y vivent. Je suis partie d’une forme en particulier, celle de cartes en bois sculptées utilisées par Gustav Holm, explorateur (colon) Danois, lors d’une expédition afin d’atteindre la côte Est du Groenland, la côte Est qui n’avait pas encore été cartographiée par les Danois, car avant Holm ils n’étaient pas parvenus à l’atteindre.

        

 

Du fait qu’elles représentent des volumes, réalisées à partir de la topographie des côtes du détroit d’Ikaasartivaq, autour de la ville de Tasiilaq à l’Est du Groenland,     et non pas à partir de lignes virtuelles sur un sol soumis au système de territoires déjà mis en place sur un partie du pays à l’époque de Gustav Holm, j’avais cette idée des cartes sculptées comme un moyen singulier de se repérer dans l’espace, dans un contexte dans lequel ces objets étaient particuliers à la communauté d’Ammassalik. Ou du moins comme un aspect inhérent et complémentaire à leur rapport à l’espace, un peu comme les peintures de dots viennent compléter les Songlines des aborigènes d’Australie. Comme un outil pour se déplacer dans l’espace, sans aucuneconnotation géopolitique de propriétés ou de conquêtes présente surles cartes planes utilisées par les Occidentaux, un outil qui représenterait une réponse au problème encore contemporain des cartes occidentales chargées d’un pouvoir de domination lié à l’acquisition de terres via celles ci. Mais là où les Songlines s’émancipent partiellement de cette culture de possession de terres, les cartes gravées s’en déclinent. La conservation des Songlines et des peintures de dots comme patrimoine historique sont un moyen pour la communauté Aborigène de se réapproprier la culture qui leur a été longtemps interdite, alors que les cartes sculptées sont plutôt symboliques de l’apogée d’un effacement culturel. J’avais découvert ces cartes un peu par hasard, lors de mes recherches plastiques, et avais effectué des recherches plus ou moins fructueuses, donnant lieu à plusieurs interprétations, comme celle qui implique que ces objets seraient   liés à une communauté, et à tout un contexte culturel, ce qui n’est pas le cas, du moins ils ne sont pas rattachés aux traditions du groupe qui m’intéressait dès le départ, c’est à dire la communauté native d’Ammassalik. Je me suis donc rendue dans la capitale du Groenland, à Nuuk, afin d’observer et d’étudier ces objets, qui devaient être exposés au National Museum, pour apprendre sur place que les cartes avaient été retirées de la collection, vendues. L’entretien que le commissaire du musée national, Mikkel Myrup, a bien voulu m’accorder, a été un moyen de répondre à ces nombreuses questions que j’avais à propos de ces objets  mais aussi de clarifier ces  

 


        














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Le voyage, le trajet, c'est l'alternance de différentes vitesses et de rythmes fluctuants, de moments d'attente et d'expériences d'expansion du temps, de moments actifs, de courses d'événements qui s'enchaînent, de rattraper ces instants qui ne nous attendront pas, comme poursuivre cette suite d'autobus qui se succèdent pour enfin entendre pendant des heures parvenir à sa destination finale, à dix-huit heures, dans une station essence à l'entrée d'une petite ville d'éleveurs et d'industriels, devant un thé sur-infusé. Destination qui n'est toujours que temporaire, dans le sens où le lieu n'est jamais le dernier visité, à part si le corps cesse complètement son activité, autrement dit, la mort. Tout lieu dépend du mouvement du corps qui le parcourt et vice-versa, de l'interaction entre les deux. On construit une relation avec chaque élément constituant un environnement possible, autant que l'espace enregistre la mémoire de chaque pas effectué. Il y a apprentissage mutuel, entre le sol, les parois et le corps. Observer tout ces nouveaux horizons et transformer progressivement le nouveau en familier, ou plutôt questionner si le familier l'est vraiment et si cela compte, lors de la construction d'un environnement. Il s'agit d'avoir des points d'attache, mais toujours liés à ce corps mobile,  des points d'attache de corps en corps liés à un espace ou plusieurs espaces particuliers, dont la mutation accompagne celle des individualités concernées. Au final les souvenirs et les traces que l'on laisse deviennent repères au sol. Nos trajets quelle que soit leur nature, forment des lignes qui s’entrecroisent et s’additionnent sur un territoire déjà marqué par sa propre évolution dans le temps.  C’est l’histoire des espaces et des personnes qui s’entremêlent qui font les lieux et les individualités, qui évoluent au même rythme dans des sens divers, partagés ou non. Un carnet de route, ou de voyage, c’est un peu comme tracer une ligne, entre deux points sur un sol. Une ligne comme un dessin, celui du corps en mouvement vers quelque direction choisie. Une ligne sur un objet physique, comme une carte, mais sans trace sur quelconque relief. C’est un peu comme si les protocoles de Yoko Ono, dans son édition Grapefruit (1962-64) étaient pris à la lettre. C’est prendre en main l’opportunité de franchir les seuils d’un territoire possible, construire sa propre fiction, et au final faire le point sur les raisons par lesquelles elle aurait moins de raison qu’une autre, au même titre qu’un territoire donné, dont la vraie nature n’est que fiction. Des fictions d’espace, dont la physicalité dépend du pouvoir du concept, et du corps qui les empruntent. Le carnet de voyage, dont la forme n’a plus vraiment d’importance, c’est faire exister d’une façon ou d’une autre un territoire sur l’espace, par un témoignage du corps, qui s’efface lorsque sa présence n’est plus. Un territoire qui se superpose au sol, comme un calque, comme la brume qui se forme par condensation, nuage de brisures de glace qui rapidement sont emportées par le vent.