Notes de lecture
Image plan/écran ( la carte ) et son rapport au territoire
— « Voler, c’est voir, et voir, c’est accéder à la connaissance ( … ) les vues aériennes de Hiroshima et Nagasaki, après les bombardements nucléaires de 1945, offrent des images signifiantes. Elles donnent à voir l’ensemble de deux villes à partir du même point de vue des avions qui les ont anéanties. Que montrent-elles réellement? À l’instar des cartes, ces photographies taisent l’horreur concrètes de des événements, contrairement aux images insoutenables des victimes brulées ou écorchées vives. Ces clichés aériens transforment l’explosion nucléaire en un phénomène de surexposition photographique ».
( À propos d’images aériennes du bombardement nucléaire )
Teresa Castro, La Pensée Cartographique des Images, pages 149-150, lignes 16-8.
—Topographie, description et sérialité: voilà les trois éléments qui permettent d’impliquer le cinéma de non-fiction des premières décennies du XXe siècle dans le déploiement général d’une rationalité cartographique, stimulée en ce début de siècle par un mouvement inédit de mondialisation ».
( À propos des images en début de siècle dernier, mais totalement transposable aujourd’hui )Teresa Castro, La Pensée Cartographique des Images, page 164, lignes 1-5.
— « Ce qui frappe dans google earth, ce sont ses fonctionnalités « cinématographiques », illustrées par la fluidité des mouvements aériens permettant à l’utilisateur de parcourir l’espace-temps, ou encore la possibilité d’évoluer en profondeur dans l’image, que ce soit à travers le zoom in ou le zoom out. ( .. ) Google earth est, par ailleurs associé à un fantasme de domination panoptique à l’ensemble de la planète. Il est difficile de ne pas évoquer cet aspect quand l’application prétend avoir photographié toute la surface de la terre ».
Teresa Castro, La Pensée Cartographique des Images, page 237, lignes 6-19.
— « Ces images profondément exhibitionnistes illustrent à la fois la dimension cinétique et cénésthésique de la vision aérienne. On est proche d’un « cinéma des attractions »: la raison d’être de ces images n’est rien d’autre que la stimulation sensorielle directe du spectateur, moins par le choc ou par la surprise caractérisée du cinéma des premiers temps, que par l’angle de vue et les mouvements de caméra. si l’oscillation filmée de cette dernière constitue « l’attraction filmée » le cinéma s’affirme en qualité de dispositif du spectaculaire par excellence, capable de montrer les sensations du vol. ».
Teresa Castro, La Pensée Cartographique des Images, page 130, lignes 25-34.
— « La question de de la surface a déjà été évoquée à propos de la polysémie des mots « carte » et « mappa » renvoyant à la même idée à chaque reprise celle d’une surface-support malléable, sur laquelle on place ou inscrit quelque chose. En fait, si les objets des cartes conventionnelles sont multiples, celles-ci se constituent inévitablement comme projections sur une surface, qu’elle soit cylindrique, conique ou azimutale, d’une certaine vision du monde ».
Teresa Castro, La Pensée Cartographique des Images, page 241, lignes 17-24.
— « La cartographie se réfère à la représentation de l’espace et des relations spatiales à travers un language qui traduit une complexité multidimensionnelle en un ensemble bidimensionnel de lignes de séparation. La carte est le résultat d’un processus d’abstraction dans lequel la différence est masquée afin de produire une image homogène et de répondre à l’ambition de décrire est de contenir la diversité sur une surface plane ».
Giovanna Zapperi, « Narrations Cartographiques », Géoesthétique, Aliocha Imhoff et Kantuta Quirós, page 29, lignes 22-31.
— « Outil des explorateurs et des conquérants aujourd’hui renseignée par un incommensurable dispositif stratégique de production d’images aériennes, la carte, à la frontière de l’art et du savoir, demeure un dessin éminemment abstrait qui déploie sur une surface plane la représentation d’un monde sphérique tridimensionnel. Comme monade du monde, elle est à la fois visible et lisible aux fins de représenter l’invisible de ce qui pourtant existe. Ainsi cette image-simulacre, véhicule d’un potentiel voyage, ouvre au monde réel mais aussi au monde imaginé comme possible. Si la carte signifie, et qu’en cela elle relève de l’index, elle est également une icône, entretenant une relation analogique avec son référent ( Tiberghien, 2007 ). »
AntiAtlas, « Border art et frontières de l’art », Anna Guilló, 2016.
— « Les cartes, à vrai dire, ne disent pas grand chose, sinon que l’humain, on ne sait pas du tout ce que c’est, et le commun non plus. »
Fernand Deligny, L’Arachnéen et autres textes, page 138, lignes 23-24.
— « Pourquoi les artistes produisent-ils de nouveaux outils cartographiques? parce que les photographies et les cartes ne se superposent plus, parce que les représentations communes ( et notamment médiatiques) ne correspondent plus à l’expérience vécue ».
Nicolas Bourriaud, «Topocritique: l’art contemporain et l’investigation géographique», dans le catalogue de l’exposition Global Navigation System ( GNS ) au Palais de Tokyo, 2003, éditions Cercle D’art, page 21, lignes 19-23.
— « La photo satellitaire et le système GPS, les caméras de surveillance ou la carte, l’expédition ou la collecte de données, appartiennent tous au domaine de pratiques que l’art doit questionner afin d’encourager une «démocratie des points de vue » « une polyculture de l’imaginaire : c’est à dire le contraire de la monoculture de l’information » ».
Nicolas Bourriaud, Topocritique: l’art contemporain et l’investigation géographique, dans le catalogue de l’exposition Global Navigation System ( GNS ) au Palais de Tokyo, 2003, éditions Cercle D’art, page 37, lignes 30-36.
— « Au sein de la masse des cartes et plans conventionnels, de nouveaux types de représentation se sont fait jour. Les uns incarnent une volonté de cotrôle de « ce qui arrive » tandis que les autres renvoient plutot à la possibilité d’une approche individuelle de la ville. Ce face à face ne fait jamais que renvoyer à la dualité findamentale de la carte : émanation d’une autorité, outil prescriptif en même temps qu’instrument de naviguation autorisant les interprétation les plus personnelles ».
Antoine Picon, Représenter la ville territoire: entre écrans de contrôle et dérives digitales, dans le catalogue de l’exposition Global Navigation System ( GNS ) au Palais de Tokyo, 2003, éditions Cercle D’art, page 60, lignes 23-31.
Déambulations et frontières
— « De même que l’écrit permet de lire les mots assemblés par une personne absente , de même les routes permettent de reparcourir le trajet des absents. Elles sont la trace de ceux qui sont passés par là avant nous, et en les suivant nonus marchons dans les pas de eux qui ne sont plus-non des saints ni des dieux, mais des bergers, des chasseurs, des ingénieurs, des émigrants, des paysans se rendant au marché, des banlieusards. Les structures symboliques telles que les labyrinthes rappellent à l’attention la nature de tous les chemins, tout les voyages ».
Rebecca Solnit, L’Art de marcher, page 100, lignes 5-16.
— « Écrire, c’est ouvrir une route dans le territoire de l’imaginaire, ou repérer des éléments jusque là passés inaperçus le long d’un territoire familier. Lire, c’est voyager sur ce territoire en acceptant l’auteur pour guide ».
Rebecca Solnit, L’Art de marcher, page 100, lignes 20-24.
— « Les chansons des aborigènes australiens sont l’exemple le plus connus de cette fusion entre le paysage et le texte: leurs paroles sont des outils pour naviguer dans l’immensité du désert, tandis que la mémorisation des traits du paysage permet en retour de se rappeler les histoires. En d’autres termes, Le texte est une carte, le paysage un récit. Les histoires, donc, sont des voyages et les voyages des histoires ».
Rebecca Solnit, L’Art de marcher, pages 100-101, lignes 36-4.
— « Les villes sont par excellence les lieux de l’anonymat, de la diversité, du rapprochement, trois qualités qui s’apprécient idéalement en marchant ».
Rebecca Solnit, L’Art de marcher, page 229, lignes 26-27.
— « La frontière est définie comme un ‘’construit’’ politique dont les formes matérielles peuvent etre diverses ( tout autant qu’une montagne, un fleuve, qu’une muraille ). Elle est aussi considérée comme dynamique, évolutive et historicisée, plus ou moins étanche, plus ou moins stable. Pour ses observateurs, et de façon générale, la frontière est à la fois une ligne ( qui sépare et crée de la discontinuité ) tout en étant une zone de contacts ( permettant toute sorte d’échanges symboliques, matériels, pacifiques ou violents ). Née de préoccupations essentiellement politiques et stratégiques liée notamment au renforcement des états-nations ( de leur contrôle de l’ennemi intérieur telles que les minorités régionales et des conquêtes territoriales externes ), l’étude des frontières s’est constituée scientifiquement au XIXeme siècle avant de connaitre un profond changement: de ligne, la frontière est devenue zone; de physique, elle est devenue culturelle. ».
Penser depuis la frontière, Expérimentations méthodologiques et épistémologiques entre art et sciences humaines, pages 8-9, lignes 14-5.
— (Citant Edward W.Saïd): « Géographie imaginaire, cette organisation mentale de l’espace qui produit des identités en établissant des frontières ».
Penser depuis la frontière, Expérimentations méthodologiques et épistémologiques entre art et sciences humaines, page 33, lignes 4-6.
— « l’Être-frontière incarne la frontière mobile, Métafrontière surgissante. Il peut soit confiner le visiteur dans la page, l’empêcher d’en sortir et figer la lecture, soit l’expulser du site . L’Être-Frontière est l’auteur de tensions entre des logiques antagonistes, de mondes conflictuels; il est un espace de fictionnalisation de soi-même, de subjectivation de l’autre, de prise de contrôle ».
Penser depuis la frontière, Expérimentations méthodologiques et épistémologiques entre art et sciences humaines, page 81, lignes 12-20.
— « Claude Raffestin notait déjà que « le territoire est la prison que les hommes se donnent » alors que la territorialité révélerait la multidimensionnalité du vécu de ces mêmes hommes. Cette tension est révélatrice de la polysémie du territoire. ».
Julien Aldhuy. «Au-delà du territoire, la territorialité ?» (Citant Claude Raffestin-Raffestin Claude (1980). Pour une géographie du pouvoir. Paris : LITEC, page 129). Géodoc, 2008, pages 35-42.
Hétérotopies, Utopies et Fictions
— « Il y a des pays sans lieu et des histoires sans chronologie; des cités, des planètes, des continents, des univers, dont il serait bien impossible de relever la trace sur aucune carte ni dans aucun ciel, tout simplement parce qu’ils n’appartiennent à aucun n’espace. Sans doute ces cités, ces continents, ces planètes sont-ils nés, comme on dit, dans la tête des hommes, ou à vrai dire, dans l’interstice de leurs mots, dans l’épaisseur de leurs récits, ou encore dans le lieu sans lieu de leurs rêves, dans le vide de leurs coeurs; bref, c’est la douceur des utopies.